Finance

Énigme de finance N° 13

Une première question conceptuelle pas du tout médiocre …

Question :

Peut-on dans le cadre d’une évaluation DCF d’une entreprise, avoir un taux de croissance à l’infini qui soit négatif ? Se rappeler que la croissance mondiale en 2025 est estimée à 3,3% par le FMI au 1er janvier 2025 et que la moyenne sur la période 2000 – 2019 est de 3,7%.

La réponse est oui. Cependant, dans la pratique, aucun banquier conseil et autres experts en évaluation ne pousseront l’honnêteté intellectuelle au point d’appliquer un taux de croissance négatif à une entreprise dont on sait à l’évidence que ses meilleures années sont derrière elles, sauf si un intérêt supérieur (le gain pécuniaire) les y pousse afin de sous-valorisée une affaire.

Justifions-nous un peu sur notre réponse positive. Pour ce faire, rappelons qu’une évaluation DCF se découpe en 2 ou 3 périodes :

  1. Un premier horizon de 5 à 10 ans et qui est celui du business plan fourni généralement par le management. Les hypothèses de performances retenues ici sont, pour le moins, volontaristes voire optimistes. Il est rare que l’évaluateur s’éloigne des hypothèses du management concernant cette phase de la vie de l’entreprise, à moins qu’il ne soit particulièrement diligent ou mieux, « motivé » pour s’en affranchir ;
  2. Une période de « cashflow fade » où les ratios de performance de l’entreprise sont progressivement ajustés pour correspondre à ce qui est attendu d’une entreprise moyenne dans le secteur ;
  3. Et enfin, la valeur terminale est déterminée suivant une hypothèse de continuité d’exploitation à partir d’un modèle de rentes perpétuelles croissantes. C’est cette dernière partie qui nous intéresse.

Conceptuellement, il est aisé d’admettre que des taux de croissance à l’infini puissent être négatifs. Souvenons-nous que le chiffre de croissance mondiale est une moyenne et que derrière chaque moyenne se cache une dispersion. Ainsi, si certaines entreprises croissent à long terme par exemple de 10%, d’autres décroissent du même ordre de grandeur voire au-delà.

Dans la réalité, admettre un taux de croissance négatif, c’est admettre la mort à petit feu de l’entreprise. Pour bien le voir, rappelons-nous que la croissance est le fruit de deux facteurs : le taux de réinvestissement des résultats (cashflows) dégagés par l’entreprise et la rentabilité marginale que ces investissements secrètent. Admettre des taux de croissance négatifs serait admettre :

  • Soit que l’entreprise, plutôt que de réinvestir, désinvestis massivement et rend les capitaux à ses bailleurs de fonds au-delà de ce qu’elle est capable de générer sur chaque période ;
  • Soit que l’entreprise s’inscrit dans un cycle de destruction de valeur avec des taux de rentabilité systématiquement négatifs.

Ces deux hypothèses sont peu alléchantes lorsque l’on cherche à racheter une entreprise. Soit on est perçu comme un fossoyeur d’entreprises, soit comme un incompétent, incapable de rentabiliser à long terme les capitaux rares qui sont investis dans l’entreprise.